Cet article décrit un fonctionnement personnel et n’a pas vocation a être universel. Bien sûr j’espère que certains se reconnaitront ici. Je pourrai aussi moi-même évoluer dans ma façon de voir. Dans tous les cas, j’ai besoin de poser les choses par écrit pour avancer. C’est d’ailleurs un principe qui s’applique à la photo et que j’explique ci-dessous.

Pourquoi faire une série ?

On a raison de penser qu’une série n’a de sens que si on sait pourquoi on la fait. On se met alors parfois à attendre quelque chose à exprimer qui puisse répondre au pourquoi : l’inspiration. On peut attendre longtemps. Personnellement, je découvre le pourquoi qu’après m’être mis en marche, comme dans une forme “d’écriture automatique”. Cela permet de rester ouvert à l’inattendu (notre imagination est bien plus limitée que la réalité) et d’utiliser notre intuition plutôt que notre raisonnement. Le but au départ est donc de créer quelque chose et de mener à bout cette recherche. Le pourquoi de la série étant mis au jour progressivement à la façon d’un archéologue.

La prise de vue

A la prise de vue, je m’applique à faire deux choses :

  • D’abord une forme de méditation qui est selon moi un des intérêts principaux de la pratique photographique. Sur ce point j’ai remarqué qu’il était bon d’avoir une routine pour se mettre en jambe et, en lâchant prise, ne pas intellectualiser.
  • Dans le même temps, j’essaie d’expérimenter en regardant les choses sous un autre angle (au sens propre comme au figuré). J’essaie d’oublier le sujet au profit de la composition. Je suis toujours étonné, quand je regarde mes photos quelques temps après, comme les expérimentations finissent par s’assembler entre elles de façon relativement cohérente et refléter mes pensées inconscientes.

En appliquant cela régulièrement, à la manière d’un entrainement sportif, on finit par se construire une bibliothèque de contraintes esthétiques et de pensées qui peuvent donner une cohérence dans nos images et surtout nous habituer à observer différemment et à “voir des photos”. Pour continuer la métaphore, cela prend un certain temps lors d’une sortie pour être “échauffé” mais aussi un certain nombre “d’entrainements” rapprochés pour progresser.

Editing

A chaque étape du processus créatif, que ce soit en sélectionnant les images (editing) ou en leur donnant un ordre dans la série (narration), j’aime revenir en arrière et continuer la prise de vue et refaire quelques aller-retours entre editing et prise de vue. Je m’efforce cependant d’aller jusqu’au bout de d’une version du projet présentable comme expliqué précédemment.

Par exemple, expliquer ma démarche, à plusieurs reprises pour Hello World, m’a permis de mesurer les arguments les moins convaincants ou trop personnels et ainsi réfléchir sur la série. J’ai besoin, entre deux introspections, de partager ma démarche. Parler ou écrire, que ce soit en photographie ou dans la vie de tous les jours (ou sur ce blog), permet de reflechir. C’est pour cela qu’une exposition ou un zine par exemple me semble important pour préparer un projet plus figé tel qu’un livre.

Pour se confronter à l’avis des autres il n’est pas nécessaire d’avoir terminé son editing. Il ne faut pas non plus placer l’approbation des autres avant nos propres critères personnels. Il faut laisser un temps personnel suffisant mais pas trop long pour laisser se “révéler” l’image de façon fidèle à nos ressentis du moment.

La narration et la mise en page

Pour Hello World, la quête de sens est le sujet même de la série. Lors des premières prises de vue je n’avais pas d’idée sur ce que je voulais dire mais au fil des photos j’ai vu, ou j’ai projeté sur elles, ce que cela racontait. J’aime cette idée que le monde extérieur me “parle” et qu’il raisonne avec mon monde intérieur. Finalement je projette ma réalité. Et cela est permis grâce à la marche et une forme de méditation comme expliqué précédemment.

Dans Hello World, la narration s’est donc construite autour de cette quête en utilisant le concept du monomythe. Cela permettait un équilibre entre cohérence et mystère (voyage, solitude, ombres, etc) et en suggérant des émotions.

Je vous laisse feuilleter les premières pages du zine sur les 80 qu’elle comporte ci-dessous :

Le zine est disponible à la vente ici.

Pour une remise en main propre contactez moi en MP sur instagram @arnaudsnomsed.

Le financement participatif et la livraison

Quand on a fait tant d’efforts pour mener son projet jusqu’à une maquette, on a alors envie de soigner la communication pour partager son projet le plus efficacement possible.

J’ai d’abord réfléchi au planning : combien de temps durera la campagne ? Quels évènements provoquer pendant la campagne ? Dans quel ordre ? A destination de qui précisément ? Les plateformes telles que Kisskissbankbank expliquent bien comment s’y prendre. En résumé, il faut préparer la communication avant la campagne et en ciblant différents cercles de populations pour avoir un effet boule de neige.

En parallèle, j’ai créé la page du projet avec globalement :

  • Un descriptif de la série : la démarche, le propos, l’origine du titre, etc
  • Les photos des objets : il faut ici réfléchir aussi aux packages proposées et la cohérence du prix par rapport à l’objectif de la campagne et les volumes espérés etc (par exemple : tirage + zine, signé et numéroté ou pas, etc)
  • Une vidéo (celle de l’interview avec Thomas Hammoudi que je vous met en bas de la page).

Spécifiquement pendant la campagne de Hello World, j’ai commandé des exemplaires en fonctions de l’avancement de la campagne car il y avait des promotions intéressantes à ce moment-là chez l’imprimeur.

Globalement, par ordre d’importance (et aussi par ordre des commandes à faire) :

  • Imprimeur (zines et tirages qui étaient chez des imprimeurs différents pour Hello World)
  • Film antistatique (spécifiquement pour mon zine Hello World)
  • Sponsoring des réseaux sociaux (j’ai essayé de mettre en avant le zine avec de la publicité mais le retour sur investissement n’en valait pas la peine).
  • Enveloppes
  • Timbres
  • Frais de la plateforme de financement

J’avais créé une feuille de calcul pour chacun des fournisseurs pour optimiser les couts en fonction de l’avancement de la campagne, des frais de livraisons et aussi des offres du moment.

Enfin j’ai ajouté à mon fichier, un onglet de suivi des envois pour chaque contributeur avec les adresses pour imprimer les étiquettes et les numéros de suivi des lettres. Pour l’envoi à l’international, cela coute encore moins cher qu’en France grace à un envoi intitulé “livres et brochures” par La Poste.

Je les ai envoyé progressivement pour rester prudent et avec un petit mot sur les tirages d’accompagnement du zine (car pas facile et risqué d’écrire dans le zine).

En résumé

En résumé je dirai qu’il y a trois temps pour éviter d’avoir une démarche trop intellectuelle simplement pour “avancer” :

  • A court terme, se vider la tête, lâcher prise, marcher, pour classer ses idées. A force, il y a comme des visions mnémotechniques (une lumière, un motif, une couleur) qui attire davantage notre regard en fonction de nos pensées. Je recommande le livre Slow Photo qui donne d’autres idées pour être dans un état de pleine conscience (cf Ma bibliothèque photo)
  • A moyen terme, en étant patient, des images se présentent à nous
  • Sur le long terme, on organise nos pensées, on analyse les images produites et on construit comment raconter une histoire avec des fils conducteurs sous la forme d’une série

Pour plus de détails sur Hello World, j’en parle sur cette chaine :